
Recréation et tournée
Les Cogitoscopes
Conception, écriture et jeu: Vincent Coppey et Jean-Louis Johannides :
Jeu: Camille Mermet
Création sonore: Fernando de Miguel
Direction technique: Florent Nolin
Administration: Anahide Ohannessian
La tournée 2022 fut l’occasion de revenir sur ces aspects initiaux d’un ensemble de 4 spectacles créés au cours de la saison 2018-019 au théâtre du Grütli, Genève.
Jean-Louis Johannides et moi formons au plateau un duo. En traversant une intrigue minimale qui débouche le plus souvent sur la recherche d’une issue, nous nous prêtons à des transformations ; nous inversons les rapports (dominé/dominant) ; nous jouons sur l’ambiguïté de notre relation, sur le genre, l’identité, nous passons de l’empathie à la prédation ; nous nous entraidons ou nous dérobons lâchement ; nous éprouvons le vertige de la compréhension, de l’impossibilité d’une explication ou d’une question qui nous engage dans une transe. Nous nous battons, nous embrassons, nous palpons, nous soutenons. Nous prenons à témoin le spectateur ; nous l’incluons dans une intrigue ; nous lui laissons de l’espace pour imaginer, se représenter, éprouver une expérience esthétique, ressentir, évaluer. Je veux dire que, en ce qui concerne la vie du plateau, c’est ainsi que nous faisons un spectacle à partir de conflits issus de concepts philosophiques.
Il ne s’agit pas de conférences. Il s’agit de créer une situation problématique à partir d’une implantation scénographique. Puis de jouer des situations, des dialogues, des rebondissements, à partir d’une relation entre deux hommes. Parfois une troisième personne est là ; parfois elle est là sans être présente physiquement. C’est toujours une investigation corporelle, un engagement physique, une attention au dire, aux registres de jeu. Nous écrivons, testons des dialogues ; la pratique de plateau développe ce qui est tout juste amorcé. Nous arrivons parfois avec des bouts de texte tirés d’ouvrages, de poèmes, de romans. Ca va vite. Au départ, il y a des lignes tracées, des temps de discussions dramaturgiques, une bibliothèque présente quelque part d’où l’on peut rapidement extraire des ouvrages. Ensuite, c’est le travail de l’imagination, des envies, des intuitions, des impressions reçues, des surprises.
Tout a commencé un jour de répétition. Il y a quelques années, nous investissions l’industrie de la viande pour un spectacle. Nous testions des séquences. Je portais une sorte de tablier de boucher. En utilisant mon corps, j’articulais une démonstration sur la présence : j’étais placé à un endroit de l’espace ; me déplaçant, je montrais le lieu que mon corps venait d’occuper. Il était là… puis la portion d’espace était vide. Mais l’essence de mon corps n’avait pas disparu, bien que sa présence n’y était plus. Une séquence sur essence/existence chez Thomas d’Aquin fut ainsi intégrée au spectacle. Nous nous sommes dit ce jour-là que nous pourrions élaborer un spectacle futur à partir d’oppositions et de conflits ou de textes philosophiques. Le théâtre, en tant qu’art de la présence, permettant de jouer sur l’ici et maintenant des idées. Par un travail d’incorporation, la conceptualisation pouvait devenir concrète et intégrée dans des situations dramatiques, le duo d’acteur y amenant une dimension relationnelle ludique, poétique ou inquiétante parfois.
Episodes 1(A force d’identité) et 3 (Dire des conneries)
Avril-mai 2022









